Balzac et la petite tailleuse chinoise / Daï Sijie
Balzac et la petite tailleuse chinoise
de Daï Sijie
Edition Gallimard Collection Folio n°3565
Sorti en l'an 2000
Prix Relay du roman d'évasion 2000
Nous vous avions déjà parlé de Daï Sijie et de son très beau roman "Par une nuit où la lune ne s'est pas levée". Dai Sijie est aussi cinéaste. Il a réalisé trois longs métrages dont "Chine ma douleur".
Voici un autre de ses romans, très beau et très dense, son premier, qui a connu un très grand succès international et a été récompensé de plusieurs prix.
Il s'agit de l'histoire de deux fils d'intellectuels chinois à l'époque de la Révolution Culturelle maoiste qui envoyait dans les champs tous ceux qui pensaient ou étaient détenteurs d'un savoir scientifique ou littéraire, quand ceux-ci n'étaient pas tout simplement enfermés. Un exil forcé loin des villes et des sources d'approvisionnement en livres ou en connaissances. C'était aussi le cas des jeunes lycéens qui étaient envoyés dans les villages pour être "rééduqués par les paysans pauvres". Une façon d'éloigner du pouvoir ceux qui pouvaient le contester, comme les héros du livre Luo et le narrateur.
Dans cette contrée éloignée de la grande ville, ils feront la connaissance d'une belle jeune femme, fille du tailleur qui traverse le pays pour le bonheur de tous les habitants fussent-ils très pauvres car "Aucun régime politique, aucune contrainte économique ne pouvait les priver de l'envie d'être bien habillés, une envie aussi vieille que le monde, aussi vieille que l'envie de maternité".
Luo et elle tomberont follement amoureux ; et lui, le "rééduquable", la rééduquera, à sa façon, par la littéraire française, surtout Balzac, une littéraire occidentale interdite évidemment, considérée comme dépravée, antirévolutionnaire.
Dépasser cet interdit, c'est entrer dans un territoire où l'impossible devient possible au risque d'y perdre aussi ce qu'on croit y gagner. Rien n'est noir, rien n'est blanc. Tout possède en soi son contraire, sa lumière et son ombre.
Que trouveront ces jeunes gens au bout du chemin de leur jeunesse ? Une maturité c'est sûr, aussi une passion de la vie quel qu'en soit le prix.
Un livre à déguster comme une belle histoire d'amour, comme un parcours initiatique qui pose plus de questions qu'il ne trouve de réponses. Mais c'est bien cela la vie, quand on croit comprendre quelque chose, des milliers d'autres questions se posent alors, pour lesquelles il restera le mystère et sa beauté.
Extraits du livre
(Page 29) Dans nos sociétés contemporaines, qu'elles soient capitalistes ou socialistes, conteur n'est malheureusement plus une profession.
(Page 49) "Le proverbe dit : un coeur sincère pourrait faire s'épanouir une pierre"
(Page 98) Je ne savais pas qu'un petit espoir pour son avenir pouvait transformer autant un type, jusqu'à le rendre complètement fou, arrogant, et lui donner tant de désir et de haine dans la voix.
(Page 109) Moi, vous voyez, je tricote sans arrêt ce pull bleu ; mais ce n'est qu'une apparence ; en fait, je compose des poèmes dans ma tête, tout en faisant du tricot.
(Page 174) Avant d'être enfermé, mon père disait souvent qu'on ne pouvait pas apprendre à danser à quelqu'un. Il avait raison ; C'est la même chose pour faire des plongeons ou écrire des poèmes, on doit le découvrir tout seul.
Bande annonce de l'adaptation cinématographique du roman par Daï Sijie lui-même
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