THEATRE DU PUZZLE

THEATRE DU PUZZLE

Le Cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates / Mary Ann Shaffer et Annie Barrows


Le Cercle littéraire des amateurs d'épluchures... par Editions10-18

 

 

LE CERCLE LITTERAIRE DES AMATEURS

D'EPLUCHURES DE PATATES

de Mary Ann Shaffer et Annie Barrows

traduit de l'américain par Aline Azoulay

Editions 10/18 - Domaine étranger (2008)

411 pages

 

Annie Barrows et Mary Ann Shaffer

 

A première vue, le contexte et le lieu de l'histoire, le style épistolaire très british laissent penser que l'auteur de ce roman est britannique. Pas du tout.

Mary Ann Shaffer, bibliothécaire et libraire à la retraite, est américaine, née en Virgine Occidendale en 1934. C'est en 1976 qu'elle s'intéressera à l'île de Guernesey lors d'un voyage à Londres. Sa fascination pour les îles anglo-normandes se forgera alors qu'elle sera coincée dans un profond brouillard à Jersey.

"Le Cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates" est son unique roman, publié en 2008, écrit en collaboration avec sa nièce Annie Barrows, auteure de livres pour la jeunesse.

Mary Ann Shaffer est décédée peu de temps après avoir appris que son livre serait publié et traduit, cette même année 2008.

En fait, si le titre reprenait complètement le nom du cercle littéraire, il s'appellerait "Le cercle des amateurs de littérature et de tourtes aux épluchures de patates de Guernesey". Sans doute un titre trop long pour figurer en première de couverture. Mais, même réduit, cela reste un titre attractif qui donne envie d'en savoir un peu plus sur ce cercle littéraire.

Sous forme d'échanges épistolaires, les personnages de ce roman racontent, par littérature interposée, Guernesey au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, la vie des habitants des îles ango-normandes sous l'occupation allemande. On découvre lettre après lettre qui ils sont, leurs liens que la guerre a fortifiés, comment ils ont survécu et surtout ce mystère  autour de ce cercle littéraire pas du tout ordinaire et d'Elisabeth, personnage au centre de tout le roman et qui n'est pas encore revenue.

 

 

Juliet, femme-écrivain trentenaire, vit à Londres dans le monde du livre et de l'écrit. Elle s'est fait connaître du grand public par la publication quotidienne dans un journal, de chroniques humoristiques sur la vie en période de guerre, texte qui sera publié dans sa totalité en livre à la fin du conflit en 1945. Ce sera un gros succès de librairie.

Lors d'une tournée de promotion de son ouvrage à travers l'Angleterre, elle sera mise en contact avec les habitants de Guernesey. C'est ainsi qu'elle va découvrir ce monde britannique aux abords des côtes françaises, presque oublié du Royaume. Elle va se passionner pour lui et ses habitants, au départ à la recherche d'une source d'inspiration. Evidemment, cela changera sa vie de fond en comble, et pas que la sienne. Les mystères vont être percés les uns après les autres.

Guernesey deviendra le centre existentiel de sa vie, sans doute à l'image de Mary Ann Shaffer, l'auteure de cet ouvrage.  

 

 

La narration sous forme épistolaire, avec le recul évident que cela provoque, donne l'impression que le lecteur vient de trouver une caisse au trésor remplie de lettres qu'il va dévorer une à une. Tout est raconté par lettres interposées sans jamais de paroles directes des protagonistes. On sait qui écrit, à qui, quand et pourquoi. Tout s'imbrique peu à peu dans l'histoire  de ce petit peuple d'une île qui se réveille après la tourmente de 39-45. C'est étonnant et lumineux.

Un mélange de Miss Marple et d'Hercule Poirot sur fond de conflit mondial et de destins brisés. Puis de vie retrouvée avec ses non-dits et ses histoires à trous que le lecteur reconstitue comme un puzzle.

 

C'est un très beau roman sur le pouvoir de la littérature, sur la puissance de l'écrit pour éclairer les vies de quelque façon que ce soit. Il y est question de Charles Lamb, des soeurs Brontë, de Victor Hugo, d'Oscar Wilde, de Sénèque et de bien d'autres. Sans jamais que cela n'apparaisse comme de l'étalage de connaissances, comme une litanie d'auteurs. On pourrait presque dire que la littérature, au travers du Cercle de Guernesey, a sauvé leurs vies, au sens propre comme au sens figuré.

Et c'est surtout un roman très original.

 

 

Extraits

 

Page 21

Peut-être les livres possèdent-ils un instinct de préservation secret qui les guide jusqu'à leur lecteur idéal.

 

Page 29

Il affirme que trente pour cent des livres sont achetés pour être offerts.

 

Page 53

Le vieil adage :"L'humour est le meilleur moyen de rendre supportable l'insupportable." 

 

Page 102

"Est-ce une chose si infime que d'avoir vécu la lumière du printemps, d'avoir aimé, d'avoir pensé, d'avoir agi, d'avoir servi de véritables amis ?"

 

Page 116

Je l'ai emmenée faire une promenade sur les falaises, un soir, et je lui ai dit : "Regarde Nancy, juste là. La clémence des cieux plane au-dessus de la mer - Ecoute le Tout-Puissant s'éveille." Elle m'a laissé l'embrasser. Et maintenant, c'est ma femme.

 

Page 155

La guerre n'en finit pas de finir, n'est-ce pas ?

 

Page 166

"La vie continue." (...) Bien sûr que non, elle ne continue pas. C'est la mort qui continue. Ian est mort et il sera encore mort demain, l'année prochaine, à jamais. La mort est sans fin. Mais peut-être y aura-t-il une fin à la tristesse.

 

Page 179

Charles Lamb (...) Il pouvait transformer une chose banale et familière en un objet neuf et somptueux.

 

Page 182

L'esprit peut de toute chose faire un ami.

 

Page 236

Comme dit Sénèque :"Les petits maux sont loquaces, les grandes peines sont muettes."

 

Page 306

Pourquoi ne lui avait-on pas dit qu'il existait des histoires d'amour sans hommes déséquilibrés, sans angoisse, sans mort et sans cimetière ?

 

Page 368

Si nous sommes prédestinés, alors Dieu est un démon (...) Quelle sorte de Dieu aurait voulu Ravensbrück ?

 

Page 378

J'ai lu un article d'une certaine Gisèle Pelletier, ancienne prisonnière politique, détenue à Ravensbrück pendant cinq ans. Elle explique combien il est dur de reprendre le cours de son existence quand on a survécu aux camps.

 

Page 392

Guernesey est propice aux écrivains, regarde Victor Hugo.

 

 

 

 


Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures... par femmes 

 

 Version anglophone de la présentation du livre

 

 

 

 

 

 



14/08/2011
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