THEATRE DU PUZZLE

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Les Encavés et la violence sociale / Pascal Marchand

 

S'il est bien un thème récurrent qui vient agrémenter l'actualité, c'est bien celui de la violence : guerres, agressions, violence conjugale, tueries, tortures, violence physique et psychologique, harcèlement, enfermement…

Pas un jour sans qu'un événement ou un fait divers vienne rappeler aux populations que le monde n'a rien d'un Eden, que l'insécurité y est de mise.

 

Ah ! L'insécurité ! Le mot est lâché. Il hante les nuits banlieusardes et les villes assoupies,  les discours ministériels et les campagnes électorales.

A croire que notre présence sur Terre est un fait acquis, une normalité sans questions. A croire que nos lendemains font partie naturellement de l'ordre des choses.

Dans un monde hygiéniste qui laisse croire au degré maximum garanti de sécurité, qui laisse penser que la force de l'homme peut vaincre tout ce que se présente à lui, est perpétré le sentiment présomptueux d'une forme de toute puissance.

 

On peut se demander qui est tenant de cette toute puissance, quels intérêts elle sert... et qui elle berne.

 

Dessin de OPS

 

Dans la pièce des Encavés, il s'agit de six personnes qui ne maîtrisent pas le monde dans lequel elles vivent. En apparence, elles en acceptent les contraintes ; et leur histoire n'a de sens que pour entrer dans ce qu'elles vont mettre en œuvre pour sortir de ces barrières cadenassées qui cherchent à nier l'humanité qui les habitent. Toute ressemblance avec la réalité de notre monde n'est pas fortuite. Car il s'agit bien d'une parabole de ce que la majorité des gens vivent sur Terre, sans parfois s'en rendre compte.

 

La violence sociale, on pourrait dire sociétale, induit des comportements de violence individuelle, de repli, de concurrence qui divisent les hommes au lieu de les réunir. Elle provoque des chaos intérieurs où les valeurs collectives ne trouvent plus leur juste place, où seul l'individu contre les autres croit pouvoir trouver sa propre voie. Quand un ministère, dit de l'Education Nationale, supprime des postes dans des quartiers en difficulté sociale, il supprime aussi les relais éducatifs, les liens d'écoute des enfants en difficulté. Il crée de la violence en mettant en place de l'indifférence à la place de lieux humains et vivants où se tissent des relations humaines. Quand les services publics disparaissent en zone rurale ou dans des quartiers considérés comme difficiles, se créent des déserts de présence relationnelle. On envoie aux populations des messages d'indifférence à ce qu'elles vivent. Et on laisse s'installer des comportements de chacun pour soi qui renforcent la loi du plus fort, c'est-à-dire dans notre pays, du plus riche, ou du plus magouilleur.

Quand on ferme des maternités dites pas assez rentables, on dévalue l'idée de la vie à naître. On crée des catégories différentes de populations, certaines avec ceux qui ont l'argent, donc le droit et le pouvoir, et les autres qui n'ont plus qu'à se débrouiller avec les moyens du bord.

 

 

Dessin de OPS

 

D'une autre façon, on en revient à une forme d'Ancien Régime avec des privilégiés qui n'ont plus pour nom noblesse ou clergé, mais financiers, grands entrepreneurs, actionnaires et spéculateurs. On parle souvent de la France d'en haut et de la France d'en bas, tous les autres, employés et chômeurs, cadres moyens, agriculteurs, ouvriers, tous les autres quoi, qu'on endort avec des rêves illusoires de fortune individuelle ou de gloire (loto, jeux de hasard, émission de téléréalité, et tutti quanti).

 

Pendant ce temps, les gouvernants, au nom de la logique économique, suppriment les derniers relais qui maintiennent encore le lien entre les gens, masquant  leurs exactions  par des discours trompeurs ou racoleurs, en tous les cas mensongers. C'est une forme de violence qu'on impose aux populations.

Il n'est pas étonnant alors que certaines personnes osent ce qu'il y a de plus facile à faire : s'en prendre à plus faible que soi, sans regarder que leurs « victimes » sont autant « victimes » qu'eux. C'est un combat violent entre victimes tandis que les « bourreaux » du système s'en frottent les mains et accusent les premiers d'être des monstres.

Ça s'appelle : diviser pour mieux régner. Une façon de diriger vieille comme le monde et qui fonctionne encore très bien aujourd'hui.

 

La seule solution pour abaisser le niveau des violences, c'est de créer du lien entre les gens, pas de les séparer, ou de les opposer. C'est de créer de la confiance, pas de la défiance envers ceux qu'on ne connaît pas. C'est de mettre de l'argent pour créer du lien social, sans chercher à transformer l'investissement humain en entreprise rentable. Car une école, un hôpital, un service postal ne peut pas être considéré comme une entreprise automobile ou une aciérie. On ne peut pas gagner de l'argent avec les services. Par contre, l'argent investi garantira une véritable paix sociale si chacun trouve des réponses à ses droits élémentaires : être reconnu, avoir un travail, un logement, un droit à l'éducation et la formation, aux plaisirs et au repos, à la dignité. 

 

C'est aussi de cela dont il est question dans la pièce « Les Encavés » : le droit à la vie.

 

 

Dessin de OPS

 

 

 



25/11/2009
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