"Loin de chez moi mais jusqu'où ?" / Pinar Selek
Entre humanisme et philosophie, droits humains et citoyenneté, voici ce très beau texte de Pinar Selek, jeune sociologue turque, militante pacifiste, qui vit en exil à Bâle (Suisse), en attendant le résultat de son procès à Istanbul où elle pourrait être condamné à la prison à vie pour soit-disant attentat, en fait pour avoir fait des recherches sociologiques sur des populations kurdes.
Malgré trois acquittements, la justice s'acharne car ses recherches ont touché un point sensible en Turquie : les kurdes. Elle ne rentrera que lorsqu'elle sera sure de son libre sort. Elle est soutenue par de nombreux universitaires turques, aussi par l'association CSF (Chercheurs sans frontières) (voir vidéo ci-dessous).
texte trouvé sur le blog de Timoxana
( http://timoxana-timoxana.blogspot.com/).
Pinar Selek est une jeune sociologue turque menacée d’une peine d’emprisonnement à perpétuité pour un attentat qui n’a pas eu lieu
Pinar Selek
Loin de chez moi...mais jusqu'ou ?
Novalis Kehre.
J'ai aimé ma maison depuis mon enfance. J'aimais le sentiment dans cette maison. J‘aimais la solitude que j'éprouvais là-bas, comme la compagnie des gens en qui j'avais confiance et un grand amour. J'aimais cuisiner et parler avec eux de nous et du monde en général. J'aimais prendre et observer les objets et les souvenirs qui m'étaient importants et ensuite préparer mon âme et mon corps pour le jour suivant.
Mais aussi, je voyais les limites de cette maison. Je savais également que les portes s'ouvraient différemment vers l'intérieur ou vers l'extérieur... Que les murs qui nous tenaient à l'intérieur en laissaient d'autres à l'extérieur. Je ne me suis jamais enfermée là-bas. Je me suis familiarisée à d'autres espaces, d'autres maisons, d'autres vies et existences.
Mais cela me fortifiait de retourner de temps en temps, dans cette maison qui m'attendait avec toutes ces choses que moi-même et les personnes qui me sont chères, avions rassemblées. M'y reposer à nouveau et m'ouvrir à l'inconnu en me remémorant les souvenirs, me fortifiait.
Ensuite, j'ai établi de petites et temporaires demeures dans diverses villes, pays et lieux pour les études et d‘autres occupations... Peu à peu les frontières de ma "Maison" se sont élargies. J'ai appris à parcourir les yeux fermés et dans des lieux temporaires, un terrain beaucoup plus vaste. J'ai expérimenté différentes manières d'exister. Toujours avec des amis.
À l'intérieur de différents processus de subjectivisation entrelacés, effondrés et reconstruits, j'ai étendu les frontières de mon espace qui m'apparaissait toujours plus étroit qu'il n'était. Dans les espaces qui ne portaient pas de trace de moi, j'ai aimé m'y perdre, apprendre les différents rythmes et garder l'allure..
Mais tout en sachant qu'un jour j'allais m'asseoir, à nouveau revenir vers moi-même, et comme le disait Levinas, que je reculerais vers ma terre comme une réfugiée.
Étant assurée que ma maison m'attendait avec mes amours et mes souvenirs, je continuais à me perdre dans Istanbul où je connaissais tous ses endroits particuliers, ses cafés secrets, ses impasses et ses coins cachés. Oui, je me perdais, même en l'absence de brouillard et aussi je me jetais vers la côte en glissant sur les vagues. En même temps, je maintenais mon existence politique dans un pays dont je connaissais la langue et les réflexes, et dont je pouvais utiliser les outils d'expression. Dans ce contexte historique particulier, je savais ce que mes mots et mes actes pouvaient signifier et également comment ils seraient compris par d'autres.
Mais mes rêves n'ont pas cessé de me suivre. Parce que je savais que la maison, excepté le confort qu'elle procurait, signifiait également tracer des frontières. J'étais déroutée par les paroles de Walter Benjamin qui définissaient le chez soi comme vivre dans un endroit sûr, dans une boîte secrète. Sous l'influence de Deleuze, je ne cessais pas de me poser la question de comment la déterritorialisation pouvait être possible. C'est pour ces raisons que j'ai refusé le mariage et les nécessités du quotidien en tant que mécanisme de domestication. Je ne voulais pas vivre dans une de ces maisons remplies de meubles identiques. Je ne voulais pas passer ma vie à regarder les programmes télévisés et à me promener dans les parcs. Vivre dans la rue à certaines périodes ou rester éveillée jusqu'au matin avec des personnes sans abri dans différents endroits, avait des liens avec ma recherche philosophique.
Mais même l'état de déterritorialisation avait sa place. Comme ces nomades qui laissent leur empreinte de pas et qui attachent de petits morceaux de tissu aux branches des arbres sur leurs routes, je créais mon propre rythme et j'apprenais quels vents allaient m’accompagner pendant que je migrais entre les espaces. Et je le répète : je me balançais les yeux fermés.
Je suis souvent tombée. Je tombais tout le temps. Mon corps saignait de ça et de là et parfois je sentais que j'allais tomber sur la tête et mourir. Mais je m'étais familiarisée aux tempêtes, mes amis étaient à côté de moi et bientôt je hissais la voile.
Au sein des frontières que j'étendais, je créais un endroit ouvert et calme qui laissait de la place aux découvertes, aux miracles, à des réunions spontanées et à des actions. J‘ai dis que je créais. Bien sûr, je n'étais pas toute seule mais au travers de ce processus de création collective, je décidais moi-même et sur la base de mes propres choix quelles frontières j'allais étendre et jusqu'à quel point; selon mon propre pouvoir, mes propres faiblesses et mes rêves.
Et puis soudain, on m’a arrachée de mon univers.
Je me suis retrouvée dans un espace dont je ne connaissais ni la langue ni les réflexes et dont les tempêtes ne m'étaient pas habituelles.
Ma maison était là-bas, loin de moi. Et elle m'était interdite.
L'espace dans lequel j'étais habituée à créer des choses et dans lequel il y avait ma propre trace, m’était interdit. Lorsque j'ai laissé derrière moi cette trace, je ne fus pas seulement séparée de ma maison mais également de moi-même.
Je ne pouvais pas y retourner. Je ne peux pas y retourner.
Vide et sans limite
La question n'est pas seulement de connaître physiquement les endroits où tu vis, mais le sentiment du chez soi est également de ne pas se sentir étrangère aux dynamiques de ces lieux. Ai-je vraiment maîtrisé toutes les dynamiques d'Istanbul ? Non. Parce que tout endroit, est globalement imprégné par des relations de domination ; je ne pouvais pas maîtriser les gigantesques mécanismes qui m'encerclaient là où je suis née ni dans les rues où je travaillais. Mais il y a une différence. Au moins je les connaissais mieux. J'apprenais et je savais mieux avec qui et jusqu'où je pouvais marcher, sur quelle pierre je pouvais poser mes pieds et quelles rues sont des impasses. Ceci augmentait certainement mon pouvoir de résister.
Est-ce que cela me domiciliait pour autant ?
Peut-être qu'un jour j'aurais changé ma direction pour venir ici. Si ce jour arrive, une personne peut quitter tout ce qu'elle possède. Mais c'est elle qui fixe le moment. On peut partir après avoir décidé ce qu'on allait laisser derrière soi, ou de quelle manière on allait le faire, ce qu'il fallait achever ou non. De cette manière on peut glisser hors de ses frontières.
Il y a une différence significative entre cette sorte de glissement et le fait d'être arraché.
Mes fleurs ont manqué d'eau, les oiseaux auxquels je donnais du pain tous les matins, mes vieux amis auxquels j'apportais de la nourriture, l'olivier que j'avais planté dans mon jardin... Le roman que j'avais commencé à lire et l'article que j'étais entrain d'écrire sont restés sur la table. Les photos de ma mère, les cadeaux de mes vieux amis, les lettres que je lisais fréquemment, la campagne politique que nous avions commencée récemment et le discours que j'allais prononcer lors de la manifestation...Mes amis m'attendent au coin de la rue...
Mon chez moi, ma maison c'était eux. Je n'avais pas fini de construire ma maison. Je continuais..
Pourquoi maintenant?
Cela peut arriver. La vie n’est pas constituée simplement de notre propre monde. Les possibilités qui s'offrent à nous dans des espaces limités ne se transforment-elles pas en même temps en chaînes qui nous entravent ? Nous ne sommes pas nées seulement dans notre maison, notre ville ou notre pays ; nous sommes nées dans le monde. N’est-il pas préférable de découvrir les miracles inconnus, les expériences, les visages de cette vie très courte que nous allons vivre et que nous pouvons perdre à chaque instant ? Mais.... S'il n'y avait pas eu de contraintes, je n’aurais pas facilement changé de direction vers ailleurs. Les oliviers, l'amie à qui j'apporte à manger et les discours à prononcer allaient continuer pour toujours.
Mais regarde maintenant, un an s'est écoulé. J'ai appris à dire mes mots, à m'amuser, à pleurer, à faire l'amour et à établir des liens à l'intérieur de ces vies que je ne connaissais pas auparavant. J'ai rencontré des gens que j'ai envie d'embrasser et ne plus jamais quitter. En plus, j'ai pu hisser la voile avec les nouveaux vents et je ne me suis pas renversée.
Je dois accepter. J'aime ces chemins. Ces rencontres dont je n'avais même pas rêvé. Rencontrer des expériences qui me paraissaient si éloignées dans le passé. Écouter. Expliquer. Être stimulée par des gens qui m'étaient inconnus. Me déployer dans ce monde non pas comme si j'étais une invitée, mais comme si j'étais chez moi, dans ma maison.
Que disait St. Hugo qui vivait en pays saxon au 12ème siècle ? "Celle qui admire son pays se trouve au début du chemin, celle qui voit tout lieu comme chez elle est puissante, mais celle qui voit le monde entier comme un pays étranger est parfaite." Alors donc, lorsqu'on est éloignée de sa maison, on comprend qu'on est exilée dans le monde. Comprendre qu'on est une exilée, n'est-ce pas là un état d'existence totalement différent ?
Lorsque j'ai perdu le sentiment de sécurité, je me suis senti également distante des symboles, des liens, des motifs et des habitudes qui m'apportaient cette sécurité jusqu'à ce moment là. Et cette distance me laisse dans le vide mais les limites de mon regard et les horizons de mes frontières s'élargissent.
Je n'aurais pas été capable d'apprendre cela si j'étais restée chez moi.
Où se trouve ma Maison ?
Lorsque je suis arrivée de Turquie, je n'avais pas de chez moi. Je me déplaçais d'une maison à l'autre avec trois valises dans mes mains. D'une ville à l'autre. Je disais : "Le monde est ma maison".
Mais ce n'était pas forcément vrai.
Je lisais continuellement Adorno qui en tant que Juif allemand avait réalisé qu'il n'aurait plus jamais de chez soi dans ce pays où il pourrait retourner après la guerre. Adorno qui comme réfugié, avait vécu dans des hôtels et des pensions pendant de nombreuses années et n'avait donc pas eu à porter la responsabilité d'avoir une résidence permanente avait dit : "Les maisons sont restées toutes dans le passé... une vie fausse ne peut pas être vécue d'une façon correcte." Questions. Questions. Aussi bien à l'intérieur de leur chez soi qu’à l'extérieur, les êtres humains de la vie moderne ne sont-ils pas tous des sans domicile fixe ? La vie actuelle n'est-elle pas basée sur l'absence de racines, d'histoire et de passé ? Les frontières du chez soi ne se sont-elles pas rétrécies de nos jours, dans cette vie, où tout est devenu à la fois si proche et si éloigné et où chacun est devenu étranger à l'autre ? Nous ne connaissons personne dans les rues, nous n'invitons plus facilement quelqu'un chez nous ? A l'intérieur de ces petites frontières et avec toutes ces télévisions et ces affaires marchandes, nos maisons ne se sont-elles pas transformées en "machines résidentielles“ ? Alors quelle est la nouvelle signification de se trouver loin de chez soi ?
Me souvenant de la recherche philosophique que je poursuivais encore, je me disais à moi-même : "Laisse l'existence déterritorialisée élargir ton horizon, tu es libérée de ces murs. Tu n'as pas à prendre soin d'une maison ni à la gérer, tu n'as pas de maison qui te ralentirait comme une tortue. Tu n'as pas de responsabilités accablantes. Tu es partout chez toi. Si tu apprends à vivre comme cela, dans l'aisance d'être capable d'aller partout où tu le souhaites, ton état d'existence gagnera un niveau différent de densité et de profondeur. Ne l'oublie pas, l'utopie se trouve loin de la maison."
Mais ça n'est pas ce qui est arrivé. Les trois valises dans mes mains devenaient plus lourdes de jour en jour. Comme il n'y avait pas d'armoire pour suspendre mes affaires dans les endroits où j'allais, je me suis retrouvée à continuellement devoir faire et défaire mes valises. Voila la déterritorialisation !
Non, ceci n'était pas ma théorie. Les millions de réfugiés que la guerre et la violence ont appauvris... Ceux qui ont été condamnés à une vie discontinue après les vies et les maisons qu'ils avaient perdues ; ceux qui ont laissé derrière eux un feu dans la cheminée ou qui ont fui n'emportant que quelques menues affaires après que leur toit se soit effondré sur leur tête ; ceux qui vivent comme des fugitifs dans les pays où ils sont arrivés après avoir sauté par dessus les barrières des frontières parce qu'ils fuyaient la pauvreté... Les exilés de la guerre et de la pauvreté ne profitent pas des avantages de la déterritorialisation ; mais ils font l'expérience de la pauvreté, de l'insécurité et du désespoir sans fin.
Les Juifs sont de ceux qui ont fait l'expérience de l'exil d'une manière très lourde. Il y a un musée juif à Berlin avec un monument dans la cour. Le Monument de l'Exil. Des routes qui sont séparées les unes des autres par des murs, des routes qui arrivent les unes dans les autres comme un couloir... Vous y entrez et vous avez le vertige. Vous faites quelques pas et votre esprit devient flou. Son calcul mathématique est construit de telle manière que le sol est penché ; les murs sont penchés... lorsque vous commencez à marcher, vous perdez votre équilibre. Vous ne pouvez pas sentir le sol sur lequel vous marchez et vous ne pouvez pas sentir les structures qui vous entourent. Ceci peut être apparenté à l'inaccoutumance. Cette petite expérience de vertige et de nausée, peut très bien nous indiquer ce qu'est la psychologie de l'exil. Vous ne maîtrisez pas le sol sur lequel vous êtes debout, c'est comme s'il était penché. Vous ne savez pas ce que vous pouvez faire avec les gens, les institutions et les structures qui vous entourent. C'est comme si tout était incliné. C'est une mauvaise sensation.
La route est-elle la maison de l'exilé ?
J'ai également fait l'expérience de cette nausée. Maintenant elle a diminué mais elle n'a pas totalement disparu. Pourtant je ne me suis jamais totalement sentie complètement en exil. Même si les poèmes et les chants qui parlent de l'exil, de la maison et du pays, m'amènent les larmes aux yeux ; la seule définition de mon état d'existence n'est toujours pas l'exil. Au moins je ne me suis enfoncée dans une émotion unidimensionnelle.
Les perspectives, les limites, les problèmes et les fardeaux de chaque lieu, chez soi ou en dehors, sont différents. Soit on se sent accablé, soit on trouve une issue de secours en jouant avec le vent.
Chez soi ou ailleurs, il est possible d'augmenter partout la profondeur et la longueur des limites. Comme le disait Heidegger, le chez soi est une sorte d'intimité; c'est notre connexion au monde et notre coin dans le monde. Ce coin peut être établi sur les routes aussi. J'ai établi ma maison lorsque j'ai appris à marcher dans les rues. Peut-être que je n'ai pas établi qu'une seule maison? Une personne peut avoir plus d'une maison, plus d'un chez soi.
Si vous me demandez encore, je tiens mon gouvernail dans mes mains et j'ai appris à jouer avec les vents une fois de plus. Mais je ne peux pas diriger mon gouvernail vers le lieu dont je parle, vers mon pays qui me manque.
Mais rien n'est jamais certain. Peut-être que les directions du vent vont changer et les eaux se calmer. Ce qui est important en mer, c'est de hisser la voile.
En sachant que l'espace est infini.
Pinar Selek - 29 novembre 2010
Turquie : Le procès de Pinar Selek fait à nouveau la une des journaux
pinarselek.com - Reynald Beaufort
samedi 27 novembre 2010 - 08:00
Pinar Selek est une jeune sociologue turque menacée d’une peine d’emprisonnement à perpétuité pour un attentat qui n’a pas eu lieu. Procès kafkaïen autour d’un "non-lieu", l’affaire mobilise l’ensemble de la presse turque à l’approche d’un nouveau procès prévu pour le 9 février prochain. Bref rappel des faits.
Les 23 et 24 novembre 2010, Pinar Selek était à nouveau à la une des journaux turcs. Toutes les télévisions et journaux nationaux tels que Radikal, Sabah, Vatan, Taraf, Takvim, Hürriyet, Sabah, Milliyet, Zaman, Birgün, Haber Türk, Cumhuriyet, Taraf, Vatan, TRT 1, CNN TÜRK, NTV, Hayat Tv, TGRT et Kanal D ont donné des informations sur le procès de Pinar Selek. Certaines de ces chaînes de télévision et journaux ont aussi présenté des interviews de Pinar Selek et de son père, qui est aussi son avocat. L’Assemblée Générale de la Section Criminelle de la Cour Suprême requiert une sentence de prison à perpétuité à l’encontre de Pinar Selek alors que celle-ci a déjà été acquittée deux fois. Cette instance a renvoyé l’affaire devant la 12ème Haute Cour Criminelle d’Istanbul laquelle avait rendu la décision d’acquittement, le procès reprendra le 9 février 2011 devant cette cour.
Le procès de Pinar Selek est devenu un scandale unique dans les annales judiciaires. Voici quelques détails sur le déroulement du procès :
Le 9 juillet 1998, une explosion s’est produite dans le marché historique dit “Bazar aux Épices” [1] causant le décès de beaucoup de personnes. Tous les rapports publiés le lendemain concluaient que l’explosion n’était certainement pas due à une bombe. D’ailleurs l’évènement fut décrit, dans les journaux et télévisions, comme causé par une fuite de gaz.
Quelques jours plus tard, la sociologue Pinar Selek, qui effectuait des recherches à propos de la question kurde et de la guerre qui en a résulté et qui, pour les mener à bien, avait rencontré et interrogé beaucoup d’interlocuteurs sur l’histoire de ce conflit, a été mise en garde à vue par la police. Non seulement la police a confisqué ses travaux, mais elle l’a aussi torturé dans le but d’obtenir les noms des personnes qu’elle avait rencontrées. Comme elle refusait de donner des noms malgré tout, Pinar a été arrêtée pour "aide et soutien à une organisation illégale”.
Un mois plus tard, Pinar Selek était présentée comme celle qui avait perpétré l’attentat du Bazar aux Épices. Ensuite Pinar Selek fut incluse dans les mis en examen du procès ouvert devant la 12ème Chambre de la Haute Cour Criminelle d’Istanbul sous l’accusation d’avoir “posé une bombe dans le Marché Aux Épices avec Abdülmecit Öztürk, sous les directives du PKK [2] et de faire partie de cette organisation”
Lors du procès, chacun des chefs d’inculpation contre Pinar ont été récusés un par un par la défense. l’autre défendeur, Abdülmecit Öztürk qui était présenté comme étant à la base même des accusations contre Pinar Selek, insista, dès le premier jour où il fût présenté à la cour, sur le fait qu’il avait témoigné sous la pression et la torture et qu’il n’avait jamais rencontré Pinar Selek, entre-temps, le rapport d’expert formulé à la demande de la cour expliqua que l’explosion, sans aucun doute, n’avait pas été causé par une bombe.
Pinar Selek a été relaxée après 2 ans et demi d’incarcération.
Malgré tout cela, le procès continua. Tout au long de celui-ci, dans le cadre de la campagne publique pour la reconnaissance de l’innocence de Pinar Selek, des centaines d’intellectuels et d’activistes des droits de l’homme se sont succédé pour assister aux auditions de la Cour pour marquer leur soutien à la sociologue. Quand il a été admis, après les auditions qui se sont étalées jusqu’en 2008 – période durant laquelle Pinar est restée sous contrôle judiciaire – que toutes les allégations selon lesquelles l’explosion était due à une bombe étaient sans fondement, Pinar Selek a été acquittée le 23 mai 2008.
Quoi qu’il en soit, le Procureur qui instruit le procès interjeta appel devant le 9ème Bureau Criminel de la Cour Suprême contre la décision d’acquittement prononcée par la 12ème Chambre de la Haute Cour Criminelle d’Istanbul. Le Bureau Criminel qui examina la décision de non lieu, l’annula pour vice de procédure. Malgré cette annulation, la Haute Cour confirma son jugement. Le 10 mars 2009, Le Bureau Criminel statua pour la seconde fois l’annulation de l’acquittement sur le fond et requerra une peine de 36 ans d’emprisonnement ferme. Le motif invoqué pour cette réquisition était le témoignage d’Abdülmecit Öztürk, lequel s’était pourtant rétracté devant la Cour. C’est aussi la même Cour qui a approuvé l’acquittement d’Abdülmecit Öztürk dont la déposition est la seule raison de la mise en accusation de Pinar tout en statuant qu’ils avaient “commis cet acte ensemble”. La Cour n’a pas non plus pris en considération les 6 rapports d’experts qui affirment que “l’explosion n’a pas été causée par une bombe”.
Le Procureur en Chef de la Cour Suprême a statué que les raisons invoquées par le neuvième Bureau des Affaires Criminelles pour l’annulation du jugement n’étaient pas adéquates et que la décision prise pas la cour locale était valide. Malgré cela, le 16 septembre 2009 la Procureur en Chef présenta sa requête à l’Assemblée Générale de la Cour Suprême, le procureur en Chef de cette dernière Cour indiqua clairement que Pinar Selek ne pouvait en aucun cas, être accusée seulement sur les allégations faites par Abdülmecit Öztürk sans qu’elle ne soient corroborées par d’autres preuves. Qu’à cela ne tienne, le procès fut renvoyé devant l’Assemblée Générale des Affaires Criminelles de la Cour Suprême. Le 9 février 2010 l’Assemblée Générale des Affaires Criminelles rejeta l’objection de son Procureur en Chef et renvoya le procès devant la 12ème Chambre de la Haute Cour Criminelle d’Istanbul qui avait prononcé l’acquittement.
Le procès se tiendra le 9 février 2011 devant la 12ème Chambre de la Haute Cour Criminelle d’Istanbul.
Devant ce déni de justice, nous invitons tous nos lecteurs à manifester leur soutien par tous les moyens
Trouvé sur le site internet de Pinar Selek le 9 juin 2011
Le Procureur a demandé l'arrestation de Pinar Selek!!!
La semaine dernière, Pinar Selek a été de nouveau convoquée par la Cour d'Assises qui avait prononcé pour la troisième fois (en 2006, en 2008, puis le 9 février 2011) son innocence.
Après sa déposition et malgré l'acquittement, le procureur Nuri Ahmet Saraç a demandé son arrestation, en insistant sur la gravité de l' accusation. Il a rappelé la dernière décision de la Cour de Cassation qui a fait appel pour la troisième fois.
Le tribunal a refusé cette demande d'arrestation en redonnant la date 22 juin 2011 pour sa décision finale. Mais cette décision ne sera pas décisive car à cause de l'appel du procureur, le cas sera renvoyé à la Cour de Cassation et la décision finale sera prise par la Cour de Cassation. Pinar Selek, attend, prise dans un brouillard qui la menace sans cesse.
Nous invitons toutes les personnes, associations et organismes qui ont soutenu Pinar jusqu'ici, de continuer à lutter contre cet acharnement et de rester vigilants. PINAR SELEK N'EST PAS SEULE !!
Jeudi 9 juin 2011.
Intervention de Pinar Selek le 25 février 2011 / Rencontre Inaugurale de "Chercheurs Sans Frontières"
Reportage Pinar Selek dans Arte Journal / 8 mars 2011 from Streetpepper on Vimeo.
Interview de Pinar Selek, sociologue turque par streetpepper / Pinar Selek est une sociologue, écrivaine et activiste turque bien connue pour ses travaux de recherche sur les processus de paix et sur la démilitarisation, comme pour ses activités auprès des plus vulnérables de la société. Injustement accusée en 1998 d'un attentat à la bombe au bazar égyptien d'Istanbul, elle est à nouveau gravement menacée. La Cour de Cassation turque veut la condamner à la prison à vie sur la base du même chef d'accusation pour lequel elle a déjà été acquittée à 2 reprises, en 2006 et 007. Le procès a eu le 09 février 2011. Pinar Selek a été de nouveau acquittée, mais deux jours plus tard, la justice turque a remis en cause le jugement. La jeune sociologue est de nouveau incertaine sur son sort .
Lien vers le site de Pinar Selek : Pinar Selek
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