THEATRE DU PUZZLE

THEATRE DU PUZZLE

Livre / "Frankenstein" de Mary Shelley

 

 

FRANKENSTEIN

de Mary Shelley

Société Coopérative Editions Rencontre

Traduction de Hannah Betjeman

Décembre 1963 / 251 pages

 

 

Vous connaissez Frankenstein ? 

 

A cette question, beaucoup diront que oui. Même sans avoir vu les films que ce héros de littérature a suscités, c'est un personnage rentré dans les grands mythes qui passent de génération en génération. Son nom laisse insinuer le frisson, l'horreur, la peur et la laideur. Il incarne la cruauté à l'état pur, le mal diabolique. Les films sur ce thème avec leurs effets spéciaux ont renforcé cette image. Mais est-ce réellement ce qu'a écrit Mary Shelley en 1818 ? 

 

Finalement, se confronter au roman permet de remonter à la source d'une légende née à l'époque des poètes romantiques anglais comme Byron dont Mary Shelley sera l'amie. Et dés les premières pages de cette oeuvre, on sent de suite que nous baignons dans ce romantisme du XIXème siècle fait de culture et de voyages, de grandes émotions et d'amour. 

 

 

Car, à dire vrai, Frankenstein est bien un livre savant et romantique où l'amour y a une très large place. On est très loin des monstres de cinéma. Les scènes de meurtre ne sont évoquées qu'en quelques lignes alors que les sentiments sont décrits en longs phrasés et sur plusieurs pages. Il est question de destin, de gloire et d'humilité, de vies tragiques et de bonheurs simples, de famille et d'amour. C'est sur ce tapis d'émotions que vient se poser l'histoire d'un monstre engendré d'un désir fou de jeune scientifique qui ne comprendra qu'après coup la folie terrible de l'acte de création qu'il a commis.

 

Cela résonne d'autant plus en 2012 que nous sommes dans un siècle où on manipule les gènes, où on fabrique des clones animaux, des organismes génétiquement modifiés. Comme M. Frankenstein, on joue aux apprentis-sorciers sans imaginer ce que cela pourrait provoquer dans dix ans, dans cinquante ans, dans cent ans pour les populations qui ne sont pas encore nés. 

Ce qui est extraordinaire dans ce roman, c'est que ces questions sur la manipulation des espèces est posée en... 1818 par une jeune femme d'une vingtaine d'années, à une époque où la science, et la biologie en particulier, n'avaient pas encore atteint le développement considérable que l'on connaît depuis la fin du XXème siècle. Il y a un côté Jules Verne dans cette écriture savante et documentée (notamment dans les lieux de villégiatures évoqués dans le livre et dans les questionnements sur la manipulation de la nature). 

Paradoxalement, on pourrait dire qu'il y a un aspect éthique dans cette histoire qui est écrit sous une forme épistolaire. En effet, l'histoire de Frankenstein apparaît dans des lettres d'un voyageur de l'Arctique, un certain Walton qui écrit à sa soeur, Madame Saville, demeurant en Angleterre. 

 

Hormis quelques passages qui pourraient sembler un peu longuets dans l'accumulation de détails descriptifs, l'histoire de cette folie créative tient parfaitement la route, et on comprend  pourquoi, dés sa parution, le livre a eu un succès notable, plus d'un siècle avant sa première adaption cinématographique (1931). 

 

Frankenstein fait partie de ces classiques qu'il est toujours bon de découvrir. Et ce verbe est ici parfaitement juste tant le monstre n'a rien à voir avec l'imaginaire qu'on s'en fait. Il n'est d'ailleurs pas si monstrueux que cela en fin de compte, à penser même que ce seraient les humains "normaux" qui seraient les monstres dans leur attitude face à la différence. Car le livre de Mary Shelley traite aussi de la tolérance. C'est un cri contre les jugements sur l'apparence, sur les a-priori. Qui est le monstre ? Le monstre lui-même ou celui qui l'a créé ? Qui est le maître ? Qui est l'esclave ? Nietzche n'est pas loin, même 25 ans avant sa naissance. 

 

Voici un bon moment de lecture. 

 

Le monstre de Frankenstein interprêté par Boris Karloff

dans la version cinématographique de James Whale en 1935. 

 

Extraits

 

Page 33

J'aurais pu passer ma vie dans le confort et le luxe, mais j'ai préféré la gloire à toutes les tentations de la richesse.

 

Page 57

On dit que Isaac Newton se comparait à un enfant ramassant des coquillages au bord de l'immense océan inexploré de la vérité.

 

Page 57

Le paysan ignorant observe les éléments qui l'entourent et connaît leur usage pratique. Le plus grand philosophe n'en sait pas beaucoup plus. Il a partiellement dévoilé l'aspect de la nature, mais ses traits immortels restent toujours pour lui une énigme et un mystère. 

 

Page 66

"On a déjà beaucoup fait, criait l'âme de Frankenstein, mais j'en ferai beaucoup plus encore en suivant le chemin déjà tracé, je préparerai de nouvelles voies, je dévoilerai des puissances inconnues et je révèlerai au monde les secrets des plus grands mystères de la création."

 

Page 70

Pour examiner les causes de la vie, il faut d'abord étudier celles de la mort.

 

Page 73

Je pensais que si je pouvais animer la matière inerte, je pourrais également par la suite prolonger la vie quand la mort semblait avoir destiné le corps à l'anéantissement. 

 

Page 117

Hélas ! Victor, qui peut être certain du bonheur quand le mensonge peut ressembler à ce point à la vérité ? 

 

Page 147

A certains moments, il me paraissait être une simple incarnation du mal, à d'autres ce que l'on peut concevoir de plus noble et de plus semblable à Dieu. 

 

Page 178

Mes défauts sont le résultat d'une solitude forcée et détestée. Si je n'ai pas d'affections, la haine et le vice seront mon lot.

 

Page 197

Je frissonnais en pensant que les siècles futurs pourraient me maudire comme leur fléau. 

 

Page 202

Comme nos sentiments sont changeants et combien étrange est cet amour de la vie qui s'accroche à nous, dans l'excès même du malheur. 

 

Page 248

Je savais que j'allais souffrir, mais j'étais l'esclave et non le maître de mes impulsions. 

 

 

 

 

 Mary Shelley

 

Frankenstein 1910 

 

 Bande Annonce -  Frankenstein 1931 avec Boris Karloff

 

 

 Extrait - Frankenstein 1931 avec Boris Karloff

 


La Fiancée de Frankenstein avec Boris Karloff


 



09/10/2012
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