THEATRE DU PUZZLE

THEATRE DU PUZZLE

Eldorado / Laurent Gaudé

 

 

"Eldorado" de Laurent Gaudé

Editions Actes Sud / Babel (2006) / 238 pages

 

Le commandant Salvatore Piracci est capitaine d'une frégate à la recherche des naufragés clandestins en partance vers l'Europe. Son  navire croise au large de la Sicile dans les eaux territoriales italiennes, à partir du port de Catane. Et son destin d'homme de la mer croise celui d'hommes et de femmes "qui ont le regard fixé sur l'horizon avec impatience et appétit". Tout cela bouleverse sa vie d'humain et de marin. Il les envie de ce désir lointain qu'il ne sent plus en lui.

 

Texte fluide et émouvant, le livre de Laurent Gaudé entraîne dans la tourmente des eaux où les bâteaux à la dérive, peu à peu, troublent l'âme de cet homme de mer aguerri, mais dont les missions de sauvetage ne deviennent jamais une routine sans émotion. Ses questions gonflent autant que la mer, se creusent dans la houle de l'âme et deviennent une obsession dévorante. Les regards et les mots de ces hommes prêts à tout pour partir de chez eux, au risque même de leur vie, auront raison de son destin de marin.

 

C'est une plongée saisissante au rythme des images et des allégories. La mer berce les désirs autant qu'elle les engloutit. Le texte de Laurent Gaudé est magnifique de simplicité et de force. Nous abordons les rives de la Méditerranée par les errances de ceux qui risquent tout parce qu'ils n'ont plus rien à perdre, de l'Europe du Sud au Moyen-Orient, en passant par l'Afrique du Nord.  

 

Un livre qui laisse des traces bien longtemps après sa lecture...

 

Extraits :

 

(Page 15) ... avec ce même regard qui semblait qu'ils avaient traversé trop de cauchemars pour pouvoir être sauvés tout à fait.

 

(Page 41) Je n'ai pas peur. Je veux quelque chose. De toutes mes forces. Je veux. Jour et nuit. Vous n'imaginez pas la force que cela procure.

 

(Page 61) ... parce que la volonté rend beau et que, devant la beauté, l'homme heureusement, a encore le réflexe, parfois, de se mettre à genoux...

 

(Page 73)  Il y avait un bâteau qui en cherchait un autre. Des hommes partaient sauver d'autres hommes, par une fraternité sourde.

 

(Page 144)  La nuit pesait sur les hommes et les engloutissait.

 

(Page 204)  Il parla de l'écoeurement devant ces magasins immenses où tout peut s'acheter mais où rien n'est vraiment nécessaire.

 

(Page 209)  Des hommes dans la nuit se racontaient des histoires pour se faire briller les yeux. Le vieux monde n'était pas mort.

 

 



22/12/2009
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